Trois études de Jacques

Trois études de Jacques, 2003
Acrylique sur toile, format 162 x 130 cm
.Collection particulière, Paris.

1998/2003 : Montparnasse

En 1998, Tessa Zerbib aborde la peinture et découvre que celle-ci s'impose à elle comme une évidence.

C'est à Montparnasse, dans les ateliers de la ville de Paris où elle suit des cours du soir, qu'elle décide, cinq ans plus tard, de mettre fin à sa carrière de graphiste pour se consacrer à cette nouvelle passion.

L'atelier, longue salle immense où les modèles défilent, juchés sur une estrade à une extrémité, comme suspendus, à environ deux mètres du sol. Ses dimensions, son agencement, donnent à chacun une vision différente du modèle. L'artiste aperçoit un pied, le haut d'un buste, une jambe, elle extrapole, elle reconstitue ces corps en morceaux...

« Je prends alors la place à l'avant près de la porte ; elle est toujours libre parce qu'on y est perpétuellement dérangé. Ici, j'ai une vision en contre-plongée du modèle, je vois le dessous d'un sein, l'ombre sous le menton, la courbe de la fesse... Cela donne à mes modèles une perspective inhabituelle. Mes personnages sont une sorte d'abstraction vivante ; je ne peux pour le moment me passer d'eux. Je dois donner au modèle toute sa grandeur, sa position dans l'espace, afin qu'il se déplace sur la toile et prenne vie. C'est cette perspective du corps humain qui me passionne ».

Tessa Zerbib ne trace pas de formats ni ne prépare de toiles. Elle agrafe un grand kraft sur le mur et esquisse deux ou trois personnages jusqu'à ce qu'elle visualise son futur tableau. Après ce travail préparatoire, elle définit son cadre et le hasard fait que ses esquisses redeviennent des « figures ». Parfois certains de ses modèles ont besoin de respirer davantage et le blanc fait partie de la composition. Souvent la feuille n'est pas assez grande et elle les sent prisonniers de leur cadre...

« J'ai appris lors de mes études d'art que deux minutes suffisent à esquisser une pose ; l'émotion doit être inscrite dans la page au cours de ces deux premières minutes, le reste est accessoire. Je me souviens de cette leçon de dessin à chacune des séances de pose. Je ne cherche pas à ajouter mais à représenter l'essentiel des formes, du mouvement. Je croque comme je respire... »

Elle écoute ses sentiments, ses ardeurs et compose des formes, des corps ; rapidement, la couleur et la matière retenues pendant une dizaine d'années éclatent. Elle jette en vrac sur d'immenses toiles sa sensibilité artistique. Son travail antérieur, c'est un travail intérieur. Le peintre s'interroge, s'engage. Elle sait, elle sent, écoute enfin sa voix intérieure et trace son chemin, celui duquel elle n'aurait jamais dû s'égarer...